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L'amazonie : sa biodiversite et le top 10 de ses animaux les plus fascinants

30 Novembre 2024

(Photo : Jaguar - Adobestock)

L’Amazonie est une vaste région naturelle de l’Amérique du Sud couverte en grande partie de forêt tropicale humide et qui s’étend sur une superficie supérieure à plus de 10 fois le territoire de la France métropolitaine.

Irrigué par le mythique fleuve Amazone qui prend sa source dans la Cordillère des Andes et le traverse d’ouest en est pour se jeter dans l’Océan Atlantique, c’est le plus grand bassin versant de la planète. Située sur l’équateur, c’est une région au climat tropical perpétuellement chaud et humide propice au développement d’une biodiversité extraordinaire.

Après un rappel du rôle important joué par les forêts équatoriales pour le climat puis un zoom sur la façon dont les vies végétale et animale s’organisent par strates dans l’environnement luxuriant de la forêt Amazonienne, nous évoquerons sa biodiversité exceptionnelle avant de vous dévoiler notre Top 10 des animaux les plus incroyables de l’Amazonie.

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LA FORET D’AMAZONIE, TRESOR NATUREL INESTIMABLE ET FRAGILE

(Photo : Une vue aérienne de la forêt Amazonienne au Brésil - Adobestock)

La Forêt Amazonienne est la zone située au nord de l’Amérique du Sud et couverte par la forêt tropicale humide. S’étendant sur 5,5 millions de km² à cheval sur 9 pays (dont évidemment le Brésil mais aussi la Guyane (collectivité territoriale française), le Pérou, le Suriname, la Colombie ou encore l’Equateur), elle comprend le bassin amazonien et des zones limitrophes tel le plateau des Guyanes, vaste massif de montagnes et plateaux sur la côte nord-est.

Par extension, le Biome Amazonien est un territoire plus vaste encore, s’étendant sur 6,7 millions de km² comprenant non seulement la Forêt Amazonienne mais aussi des écorégions directement connectées au bassin versant et incluant d’autres types forêts (de plaine, saisonnière, d’altitude, de bambous, de palmiers, etc ), des savanes, des marécages, des landes de plaine et de la toundra alpine.

Qu’il s’agisse du bassin versant, de la forêt ou du biome, l’Amazonie est un trésor naturel de notre planète à la biodiversité inégalée dont on dit souvent, au même titre que les autres forêts pluviales situées sur l’Equateur (en Afrique Centrale, en Asie du Sud-Est et en Océanie) qu’elles sont les poumons verts de notre planète.

Si le rôle de ces forêts comme producteurs d’oxygène est probablement surestimé (les mers et océans en produisent bien davantage) car ce sont des écosystèmes qui en consomment aussi énormément, elles n’en restent pas moins des pièges à carbone puissants et agissent comme des régulateurs fondamentaux du climat et des précipitations sur leurs continents respectifs.

A l’heure des nombreux défis à relever face au changement climatique, leur exploitation anarchique et leur disparition progressive constituent des menaces existentielles.

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COMMENT LA VIE S’ORGANISE PAR STRATES DANS LA FORET PLUVIALE

(Photo Adobestock)

Dans la forêt amazonienne, les plantes et arbres à larges feuilles dominent le règne végétal qui s’épanouit à la faveur du climat perpétuellement chaud et humide. Champignons multiples (dont les espèces ‘saprophytes’ se nourrissent de la végétation en décomposition), plantes extraordinaires fleurissant plusieurs fois dans l’année, plantes carnivores (Brocchinia, Catopsis, Genlisea et autres Héliamphores) se nourrissant d’insectes, passiflore grimpante gorgée de nectar (au grand bonheur des colibris) ou spectaculaires figuiers étrangleurs : l’extravagance et la diversité (40.000 espèces dont 16.000 essences d'arbres !) des plantes est ici unique au monde.

La vie végétale dans les forêts tropicales humides croît en hauteur vers le soleil et s’organise par étages avec au sol une première strate herbacée assez éparse et limitée à moins de 1 m de hauteur (les sols sont assez pauvres, la luminosité souvent extrêmement limitée). Lui succèdent jusqu’à 4,5 m de hauteur la strate arbustive constituée d’arbustes formant des fourrés quasi impénétrables puis une strate moyenne jusqu’à 15 m de haut formée de petits arbres dont les cimes ne se touchent pas. A l’étage suivant (entre 15 m et 24 m de hauteur) on trouve la voûte forestière compacte formée par les couronnes des arbres de grande taille. Au-delà de 24 m (et jusqu’à 36 m !) de hauteur pointent les sommets épars des très grands arbres qui surplombent la voûte et forment la canopée

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L’AMAZONIE ENFER VERT POUR LES HOMMES

(Photo : Le piranha rouge Pygocentrus nattereri, un des nombreux habitants terribles des rivières de la forêt amazonienne ! © Julien PIERRE)

Chaleur suffocante, taux d’humidité relative de 80%, végétation inextricable, moustiques en pagaille et cortège de bébêtes sympathiques : hello candiru (le poisson vampire du Brésil qui vous remonte dans l’urètre quand vous urinez !), piranhas, grenouilles mortelles, mygales et autre anaconda géant. Pour qui n’appartient pas aux quelque 200 peuples autochtones y vivant encore de nos jours (appelés indiens dans le sillage d’un Christophe Colomb qui pensait alors avoir découvert les Indes Orientales), la Forêt Amazonienne est un véritable enfer vert !

Nombreux sont les réalisateurs qui ont d’ailleurs choisi cet environnement hostile comme décor pour des classiques du film d’aventures. On pense notamment à Sorcerer (Le Convoi de la Peur en VF) (1977), La Forêt d’Emeraude (1985), Apocalypto (2006), le prologue des Aventuriers de l’Arche Perdue (1981), Quand la Rivière Devient Noire (1986) ou encore le magnifique The Lost City of Z (2016), pour n’en citer quelques-uns parmi nos favoris :)

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L'AMAZONIE PARADIS DE LA BIODIVERSITE SUR TERRE

(Photo : Colibri saphir oenone Chrysuronia oenone - Adobestock)

La Forêt Amazonienne est un hotspot absolu de biodiversité qui regrouperait à celle seule de 50 à 70 % de la biodiversité mondiale pour citer le WWF via Wikipédia. On y a identifié plus de 400 espèces de mammifères et d’amphibiens, plus de 300 espèces de reptiles et 2.000 de poissons, près de 1.500 d’oiseaux et plus de 2 millions d’espèces d’insectes (dont 7.000 espèces de papillons) !   

Parmi cette faune unique au monde (comprenant tapir, cabiai, paresseux, singes hurleurs, toucans, aras, anguille électrique, ocelot, jaguarondi, loutre géante ou colibris), nous avons souhaité vous faire découvrir certaines espèces fascinantes : découvrez notre Top 10 des animaux des animaux les plus fascinants de l’Amazonie ! Embarquez sur la pirogue, c’est parti !

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YAPOCK LA PETITE LOUTRE DE LA GUYANE QUI N’EN EST PAS UNE

(Image : Montage à partir de deux images Wikimedia Commons ; gravure CC0 Public domain et photo par Enrique Gonzalez CC BY 4.0)

Dans son magnifique ouvrage ‘Les Animaux de Buffon’ où Jacques Cuisin fait revivre des planches animalières colorisées du célèbre naturaliste français du XVIIIème siècle, l’auteur raconte qu’au moment de représenter le yapock, Buffon le confond avec une loutre et va jusqu’à le nommer ‘petite loutre de la Guyane’.

Pourquoi cette erreur ? C’est que de prime abord, ce petit animal (de 60 cm à 80 cm de long dont la moitié de queue) extrêmement discret et rarement observé comptant peu de spécimens naturalisés présente nombre de similitudes avec la loutre : vie aquatique dans des torrents et rivières, pattes postérieures palmées, corps ramassé et allongé à la forme hydrodynamique, pelage hydrofuge, longues vibrisses et régime alimentaire à base de poissons, amphibiens et crustacés.

Fausse piste cependant car plusieurs caractéristiques de notre ami Chironectes minimus (longues oreilles, queue glabre préhensile à bout blanc et pelage court et bicolore mélange de brun et de blanc-beige) suggèrent son appartenance à un clade différent des loutres (les mustélidés), autant d’indice corroborés par la présence d’une poche ventrale (pour y élever ses petits puis les garder au sec chez Madame et protéger ses organes génitaux chez Monsieur) qui trahit l’appartenance du yapock à l’infraordre des … marsupiaux !

Car en effet la petit loutre de Guyane, animal furtif, solitaire et nocturne qui se repose le jour dans un terrier aménagé garni de feuille creusé dans la berge et vit dans des torrents montagnards, ruisseaux et rivières de régions sud-américaines hors bassin amazonien, fait partie de la famille des Didelphidés, mammifères marsupiaux d’Amérique aussi appelés sarigues ou plus communément opossums. Et parmi les quelque 17 espèces d’opossums existantes et volontiers arboricoles, le yapock (ou yapok) – nommé ainsi car observé dans l’Oyapock, le fleuve séparant la Guyane du Brésil – est le seul à s’être adapté à un mode de vie aquatique… à la manière des loutres.

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HARPIE FEROCE LA TERREUR DE LA CANOPEE

(Photo : Harpie féroce - Adobestock)

Avec son air sévère, sa taille XXL (elle peut dépasser les 2 m d’envergure !), son gros bec puissant et ses redoutables griffes, la harpie féroce Harpia harpyja est la terreur de la canopée ! Peuple des singes, oiseaux, paresseux et reptiles qui évoluez dans la cime des arbres des jungles du sud du Mexique au Bassin Amazonien, craignez ce prédateur au vol incroyablement agile capable de manœuvrer à la vitesse de l’éclair entre les branches et fondre sur ses proies occupées à se nourrir ou se reposer.

Appartenant chez les rapaces à l’ordre des Accipitridés (qui comprend également les aigles et les pygargues), la harpie a un plumage gris, noir et blanc, une grosse tête avec une double huppe (et qui lui fait comme une crinière ornée de deux oreilles façon méchant Mickey lorsqu’elle hérisse ses plumes), un bec robuste et fort, une queue aux longues plumes grises barrée de bandes noires horizontales et des pattes puissantes armées de griffes terribles de 12 cm de long. Elle mesure de 89 cm à plus d’1 m de long pour un poids de 5 kg à 9 kg, les femelles étant plus grandes et plus massives que les mâles.

Le couple, fidèle à vie, construit une plate-forme géante constitué d’un gros amas de branchages sur un arbre qui domine la forêt et offre une vue dégagée sur les environs. Si la femelle pond deux œufs, seul le premier à éclore sera élevé. Mâle et femelle, après s’être partagés la couvaison pendant presque deux mois, apportent ensuite grands soins et éducation à leur descendance pendant une dizaine de mois, la harpie ne se reproduisant que tous les deux à trois ans.

Classée ‘Vulnérable’ sur la liste rouge des espèces menacées de l’UICN, la harpie féroce, par la niche écologique qu’elle occupe et sa prédation sur les singes, n’est pas sans rappeler un autre formidable rapace d’Asie justement surnommé ‘l’aigle des Singes’, le pithécophage des Philippines Pithecophaga jefferyi, un aigle géant qui compte parmi les rapaces les plus rares et les plus menacés au monde dont il ne resterait que 500 individus selon les estimations les plus optimistes. Même si elle-même est menacée par la destruction de son habitat et les tirs des éleveurs de volaille qui craignent ses ravages, la harpie féroce compterait une population sauvage estimée à quelque 250.000 individus (estimation haute).

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OUAKARI CHAUVE LE SINGE A TETE D'IVROGNE

(Photo : Ouakari chauve Cacajao calvus ssp. - Adobestock)

Comme pour les oiseaux, le bassin Amazonien est un formidable réservoir de diversité chez les primates : atèles, singes laineux, hurleurs, saïmiris, sakis, tamarins et ouistitis s’y déclinent en nombreuses espèces qui s’épanouissent dans ces immenses forêts.

Parmi les singes du Nouveau Monde, il en est un qui se démarque par son aspect qui le fait ressembler à un ivrogne chauve et imberbe arborant le teint rougeaud d’une sortie d’apéro bien tassé. Contrairement à son modèle adepte du zinc des rades de France et de Navarre, plus notre ami primate à le visage rubicond en meilleure santé il se trouve être.

Doté d’une épaisse toison hirsute allant du roux au blanc-gris selon l’espèce et d’un visage totalement imberbe, l’ouakari chauve est un singe de taille moyenne qui mesure de 38 cm à 57 cm de long (+ queue de 14 cm à 18,5 cm) pour un poids de 3 à 6 kg soit des mensurations proches de celles du capucin brun ou du titi (sans la queue qu’il a plus  courte et non-préhensile).

C’est un singe strictement arboricole qui se déplace avec aisance dans les branches et descend rarement au sol. Il vit en petits groupes au sommet des frondaisons de la forêt, généralement à proximité d’une rivière et d’un lac. Actif la journée, il se nourrit de feuilles, bourgeons, fruits, nectar, fleurs et insectes. Très discret, monogame et plutôt tranquille, il est plus silencieux que les autres singes – sauf quand il défend son territoire contre des concurrents.

On distingue chez les ouakaris ceux qui ont cette face rouge et imberbe caractéristique (4 espèces d’ouakari chauve Cacajao calvus (C. c. calvus, C. c. rubicundus, C. c. ucayalii et C. c. novaei) qui se distinguent entre eux par leurs aires de répartition et la couleur de leur pelage allant de roux à blanc en passant par le doré) et les ouakaris noirs, mignons singes hirsutes au pelage sombre sans la face imberbe de leurs cousins calvus (3 espèces distinctes : Cacajao melanocephalus, Cacajao hosomi et Cacajao ayresi).

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MATAMATA LA PLUS ETRANGE DES TORTUES

(Image : Tortue matamata © Julien PIERRE)

Parmi les créatures les plus étranges du règne animal, la tortue matamata Chelus fimbriata a une apparence physique qui la confond complètement avec le fond de mares boueuses et marécages où elle se tient immobile pendant des heures et se meut avec une extrême lenteur, projetant à l’occasion sa large gueule à la vitesse de l’éclair sur toute proie aquatique (poissons et invertébrés) qui passerait à proximité. A la manière du poisson-pierre, des phasmes ou de la grenouille feuille (grenouille cornue asiatique Megophrys nasuta), elle a poussé le mimétisme au rang d’art pour ressembler à un véritable tas de débris végétaux : une carapace irrégulière d’une cinquantaine de cm de diamètre sur laquelle poussent des algues, une peau couleur bois pourri parsemée de replis, des pattes griffues et une tête plate et triangulaire au bout d’un long cou qui se finit par un appendice nasal en forme de tube lui permettant de respirer en restant immergée.

Chez les tortues, la matamata appartient au sous-ordre des pleurodires qui regroupe des familles et genres de tortues à long cou qui plient leur cou en S pour le rentrer dans leur carapace comme les péloméduses ou les  tortues à long cou australiennes du genre Chelodina.

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CAIMAN NOIR LE ROI DES CAIMANS

(Photo : Caïman noir - Adobestock)

Le riche et complexe système hydrographique du bassin Amazonien héberge un grand nombre de représentants du vénérable ordre des Crocodiliens, dont plusieurs espèces de caïmans (tels le caïman à lunettes, le caïman à museau large Caiman latirostris ou le caïman de Schneider Paleosuchus trigonatus) et une de crocodile.

Si la plupart des espèces de crocodiliens de l'Amazonie sont de taille relativement modeste, il en est deux qui se distinguent par leurs mensurations nettement plus imposantes, deux reptiles géants sur lesquels mieux vaut éviter de tomber un jour où ils seraient mal lunés : à ma gauche le mythique caïman noir Melanosuchus niger dont certains individus peuvent atteindre voire dépasser les 6 m de long ; et à ma droite, le redoutable (et très menacé) crocodile de l’Orénoque Crocodylus intermedius chez lequel une taille record à 7 m de long a été rapportée ! Prenons le temps de dresser le portrait de ces deux prédateurs dont on se demande bien qui sortirait vainqueur en cas de combat.

Le caïman noir

Dans ce paradis des caïmans (qui appartiennent à la famille des Alligatoridés) qu’est l’Amazonie, le plus costaud c’est donc le caïman noir. Capable de frôler les 50 km/h quand il nage, le Léon Marchand des crocos a été abondamment chassé pour sa peau et sa chair et bien qu’il soit encore présent dans une grande partie du bassin amazonien, ses effectifs se sont réduits comme peau… de croco chagrin.

Parmi ses caractéristiques, son museau en pointe arbore à l’âge adulte des rayures grises ou brunes à la mâchoire inférieure et il a également des rayures jaunes à blanches sur les côtés de son corps dont la peau sombre produit un cuir noir et brillant.

Après 2 à 3 mois de gestation la femelle pond une quarantaine d’œufs dans un nid de boue à la saison sèche. Quand les œufs commencent à éclore, elle libère le nid pour aider les petits à s’extirper, qui se regroupent ensuite dans l’eau et forment des groupes incluant d’autres jeunes, tous évoluant sous la protection de leurs génitrices attentives.

Le caïman noir se nourrit d’une grande variété de proies incluant dans ses jeunes années insectes, mollusques et crustacés puis des proies plus grosses à mesure qu’il grandit telles que divers poissons jusqu’à des mammifères comme le cabiaï voire du bétail qu’il lui arrive de sortir chasser à terre à la faveur de l’obscurité. Des attaques sur l’homme ont également été rapportées.

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CROCODILE DE L’ORENOQUE UN MONSTRE EN SURSIS

(Photo : Crocodile de l'Orénoque - Wikimedia Commons - Chrislorenz9 - CC BY-SA 4.0)

Les crocodiles des Amériques

L’Afrique, l’Asie et l’Océanie n’ont pas le monopole des crocodiles ! Si les Amériques sont le royaume des caïmans et des alligators, elles comptent également 4 représentants du genre Crocodylus :

  • En Amérique Centrale et jusque dans le Golfe du Mexique vit le crocodile de Morelet Crocodylus moreletii  (statut ‘Préoccupation Mineure’) ;
  • Le crocodile de Cuba Crocodylus rhombifer a le statut ‘En danger critique d’extinction’ avec seulement quelque 2.400 individus recensés à l’état sauvage ;
  • Le crocodile américain Crocodylus acutus (statut ‘Vulnérable’, présent au Mexique, au sud de la Floride, à Cuba, en Haïti, en Jamaïque  et jusque dans le nord de l’Amérique du Sud) ;
  • Le crocodile de l’Orénoque Crocodylus intermedius qui évolue dans quelques zones très localisées du bassin du fleuve Orénoque au Venezuela et en Colombie.

Le crocodile de l’Orénoque, un géant très menacé

Chassé à outrance pour sa peau au XXème siècle et aujourd’hui encore confronté à la pollution de son milieu naturel et à la fragmentation de ses populations, le crocodile de l’Orénoque, localement appelé caïman de l’Orénoque (‘caimán del Orinoco’) ou caïman de plaine (‘caimán llanero’), est devenu extrêmement rare et est considéré comme une espèce ‘En danger critique d’extinction’.

Si des individus frôlant les 7 m de long furent identifiés durant les siècles précédents, les derniers représentants sauvages du vénérable saurien affichent des mensurations plus modestes et ne dépassent pas les 5 m. Parmi ses traits distinctifs, Crocodylus intermedius a une gueule longue et qui va s’affinant à son extrémité, rappelant celle du crocodile de Johnston. Certains individus dits ‘jaunes’ (amarillos en VO) ont une peau plus claire sur le dos et les côtés, un second type affiche des tâches sombres et un dos gris vert (spécimens dits mariposos – on vous laisse regarder pour la traduction qu’on n’a pas vraiment comprise) et un troisième type d’individus dits 'noirs' (negros en espagnol) qui ont une peau sombre sur le dos et les flancs et sont réputés plus massifs et plus agressifs.  

Le fait marquant chez le crocodile de l’Orénoque, c’est malheureusement aujourd’hui l’extrême précarité de ses effectifs sauvages. Sa page wikipedia évoque quelque 1.700 individus en 2013 répartis entre Vénézuela (pour majeure partie) et Colombie, sa fiche sur le site de l’UICN affichant de son côté une estimation entre 90 et 254 individus !

Malgré les mesures de protection volontaristes mises en place, la population sauvage de ce crocodile continue de décroître et une partie de sa survie passe sans doute par les élevages conservatoires et les opérations de relâchers d’individus matures pour renforcer ses populations et tenter de sauver l’espèce. Le saurien n’atteignant sa maturité sexuelle qu'à 9-10 ans seulement (il peut vivre 80 années), des programmes comme celui de l’Université Nationale de Colombie optimisent les chances de reproduction en privilégiant la réintroduction d’adultes plus aptes à survivre et perpétuer l’espèce.

BOTO OU DAUPHIN ROSE DE L’AMAZONE L’ESPRIT DE LA RIVIERE

(Vidéo : 'Colombie | Extrait : Les dauphins roses, animal sacré', Chaîne National Geographic Wild France sur Youtube)

Chez les Odotoncètes, les cétacés à dents, certaines espèces vivent exclusivement en eau douce : ce sont les étranges dauphins d’eau douce, auxquels nous avons d’ailleurs dédié un dossier complet.

Parmi elles, le dauphin rose de l’Amazone, aussi appelé boto ou encore inie de Geoffroy, présente toutes les caractéristiques de ces dauphins primitifs : yeux atrophiés, melon frontal développé, long rostre fin et souple garni d’une trentaine de paires de dents, nageoire dorsale remplacée par une simple bosse et larges et puissantes nageoires pectorales digitiformes qui lui permettent de se déplacer avec aisance dans les eaux encombrées du fleuve amazone qu’il sonde grâce à l’écholocation.

Animal sacré pour les amérindiens (séducteurs et tentateurs/-trices en puissance pour les uns, réceptacles de l’âme des défunts se réincarnant en dauphins pour les autres) et réputé pour son caractère plutôt curieux, il vit soit en solitaire soit en petits groupes dans différentes rivières et affluents du bassin amazonien où il chasse divers types de proies.

D’une espèce au départ, descendante probable de Pebanista yacuruna, un ancêtre géant de 3,5 m de long  qui évoluait il y a 16 millions d’années dans la proto Amazone (et fait le lien avec les espèces asiatiques actuelles de dauphins d’eau douce), ce sont maintenant trois espèces distinctes du dauphin de l’Amazone qui ont été identifiées : Inia geoffrensis geoffrensis qui évolue dans la partie centrale du bassin, Inia geoffrensis humboldtiana qui vit dans le bassin de l’Orénoque, et Inia geoffrensis boliviensis qui vit dans le cours supérieur de la rivière Madeira, coupé de la rivière Amazone par des chutes infranchissables.

Totalement inféodés à leur environnement et intimement liés à sa qualité ou sa dégradation, les dauphins de l’Amazone sont des espèces très menacées par les activités humaines à commencer par les barrages hydroélectriques (qui fragmentent les populations) et par la compétition avec les pêcheurs locaux, les botos venant voler des poissons dans les filets et les pêcheurs les punissant pour cela.

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JAGUAR ENFANT DE LA LUNE ET HEROS CIVILISATEUR

(Photo : Jaguar - Adobestock)

Seigneur de la forêt amazonienne, le jaguar Panthera onca était vénéré par les civilisations précolombiennes qui lui vouaient un culte et lui prêtaient de nombreux pouvoirs dont celui de héros civilisateur donnant le feu aux hommes.

Toujours associé à la lune et l’obscurité (car il est avant tout nocturne) et parmi les nombreux symboles auquel  le jaguar est associé, on peut citer  :

  • Chez les Mayas, le jaguar était tour à tour un soleil noir symbole de la nuit, une incarnation de la déesse Lune-Terre dont la mâchoire dévorait le soleil au crépuscule et le gardien originel des champs de maïs.
  • Chez les Indiens Tupinambas au Brésil, le dernier des jaguars est recueilli par la Lune qui le cache jusqu’à la fin des temps où il revient alors sur terre pour dévorer les hommes.
  • Chez les Aztèques, le jaguar et l’aigle représentaient les deux ordres supérieurs de la chevalerie chez les guerriers.

Outre sa puissance symbolique, le jaguar est un grand prédateur puissant et agile capable de grimper aux arbres et nager avec aisance, le plus grand félin d’Amérique Sud – qui compte d’ailleurs de nombreuses autres espèces telles le puma, l’ocelot, le jaguarondi et le margay mais aussi le chat de Geoffroy Leopardus geoffroyi, l’oncille Leopardus tigrinus aussi appelé chat tigre ou chat tacheté, le guigna ou chat du Chili Leopardus guigna, le colocolo Leopardus colocolo et le chat des Andes Leopardus jacobita.

Autrefois capturé avec parcimonie pour les cérémonies religieuses (la peau du jaguar était le cadeau des guerriers à leur empereur chez les Aztèques), le jaguar fut ensuite abondamment chassé avant que des mesures de protection ne soient mises en place pour tenter d’endiguer son déclin. Il demeure aujourd’hui menacé par l’expansion des routes, la déforestation et la disparition de son habitat au profit d’élevages bovins géants, des proies faciles qu’il lui arrive d’attaquer (ce qui l’expose à la vindicte des éleveurs). Il figure sur la liste rouge des espèces menacées avec le statut ‘Quasi menacé’.

Si la forêt amazonienne constitue un habitat auquel il s’est parfaitement adapté, ce formidable chasseur, vagabond errant et solitaire, évolue sur des territoires immenses et sa présence est attestée bien au-delà du bassin amazonien. Présent sur le continent américain du Mexique au nord de l’Argentine, il existe 9 sous-espèces du jaguar évoluant dans une grande variété de biotopes forestiers et jusqu’aux immenses prairies et savanes inondées du Pantanal et les plaines boisées du Chaco.

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HOAZIN OISEAU SI BIZARRE ET SURVIVANT DU JURASSIQUE ?

(Photo : Hoazin huppé - Adobestock)

La Forêt Amazonienne regorge d’espèces d’oiseaux fascinantes : aras colorés et bruyants, magnifique coq de roche orange Rupicola rupicola avec son éventail sur la tête, fragiles et flamboyants oiseaux-mouches, étonnante coracine ornée Cephalopterus ornatus aussi appelée oiseau-ombrelle qui arbore une huppe spectaculaire et un long bourrelet emplumé d’une quinzaine de cm (mâle) sous la gorge.

Alors pourquoi diable, parmi tous ces volatiles magnifiques, en retenir un pour notre top 10 qui n’est ni le plus beau ni le plus grâcieux ?

C’est que celui qui nous intéresse présentement, à savoir notre ami l’hoazin huppé Opisthocomus hoazin, se démarque de ses confrères par bien des aspects… à commencer par son aspect justement qui rappelle furieusement Archaeopteryx, sorte d’animal hybride à mi-chemin entre le lézard et l’oiseau qui évoluait dans les forêts du Jurassique il y a 150 millions d’années en voletant de tronc en tronc auxquels il s’agrippait grâce aux griffes sur ses ailes.

Et de griffes aux ailes, l’hoazin en est justement doté, permettant aux jeunes qui en naissent équipés d’une solide paire de grimper et s’agripper à la verticale des troncs ! Comme il vole mal (voire pas du tout quand il est très jeune), ces griffes qu’il perdra à l’âge adulte lui permettent de filer rapidement en se cramponnant aux branches pour s’échapper en cas de danger.

C’est un oiseau assez grand qui peut atteindre les 70 cm de long pour une envergure d’une soixantaine de cm et un poids de 700 gr à 900 gr. Doté d’une face bleue sans plumes et d’yeux rouges, d’une huppe de longues plumes sur la tête et d’ailes larges et lourdes, il possède un système digestif spécial avec un estomac placé haut dans la cage thoracique ce qui le rend inapte au vol à l’issue de ses repas, notre ami volatile préférant alors se caler sur sa poitrine pour digérer plutôt que s’envoler vers les cieux.

Il vit dans les zones de forêts inondées, forêts galeries et les arbres au-dessus des marais, lacs et berges le long des fleuves Amazone et Orénoque car c’est là qu’il trouve les essences des plantes dont il consomme les feuilles qui constituent le gros de sa nourriture et qu’il digère ensuite grâce une bactérie spécifique (en dégageant paraît-il une odeur réputée nauséabonde). Il est en quelque sorte un oiseau… ruminant (le seul du règne animal actuel) ! Il complète son alimentation avec des fruits, des fleurs, des insectes et de petits crabes.

L’hoazin se reproduit lors de la saison des pluies. Après que le couple se soit établi sur un territoire, la femelle pond généralement 2 à 3 œufs dans un nid construit en hauteur au-dessus de l’eau. En cas d’attaque par un prédateur, les petits sont capables de jeter à l’eau et nager.

Totalement à part et unique chez les oiseaux, l'hoazin huppé est un véritable casse-tête en matière de classification et il a depuis sa découverte été alternativement classé dans divers ordres dont celui des Gruiformes, des Galliformes (poules et consorts) et des Cuculiformes.

PIPA L’ETRANGE GRENOUILLE DETESTEE DES TRYPOPHOBES

(Vidéo : 'Les images impressionnantes de la naissance de petites grenouilles pipa pipa', Chaîne National Geographic Wild France sur Youtube) 

La nature et l’évolution ont cela de passionnant qu’elles ne manquent jamais de créativité quant à imaginer des façons extraordinaires de perpétuer la vie. Et dans ce rayon, la grenouille Pipa pipa (qui n’a qu’un seul ‘p’ à son nom car elle n’est pas née Middleton :), aussi appelée crapaud du Suriname, a une façon absolument unique de transporter et élever sa descendance qui ne plaira sans doute pas aux trypophobes.

Commençons par décrire notre amie Pipa pipa, amphibien étrange d’une bonne dizaine de cm de long appartenant à la vénérable famille des Pipidaes apparue lors du Crétacé (- 145 à – 66 millions d’années) et au genre Pipa (qui compte 7 espèces) et qui comme ses cousines xénopes (genre Xenopus) est dépourvue de langue, a des tout petits yeux tout ronds sur le haut du crâne lui prodiguant une vision panoramique et cette allure bizarre de grenouille boursouflée qu’on aurait passée dans une presse hydraulique – le côté extra-plat étant encore plus prononcé chez Pipa qui est vraiment très plate avec une grosse tête triangulaire.

Une autre caractéristique remarquable du crapaud du Suriname, ce sont également ses doigts qui se terminent par de petits appendices/tentacules qui lui servent d’organes sensitifs, véritables pupilles tactiles  pour repérer sa nourriture (crustacés, petits poissons, larves d’insectes, vers) dans les fonds vaseux des lacs, étangs et zones marécageuses du bassin amazonien (ainsi qu’à Trinité-et-Tobago). Elle est un amphibien strictement aquatique qui remonte respirer à la surface toutes les 30 minutes. Plutôt solitaire, elle s’établit sur un territoire et ne cherche la compagnie de ses congénères que pour se reproduire. Après que le mâle se soit confronté à ses éventuels concurrents, il s’accouple avec la femelle.

Le mâle s’arrime sur le dos de la femelle avec ses pattes au niveau du ventre de celle-ci et commence alors un ballet aquatique complexe entre les deux amants qui se projettent vers la surface et effectuent un arc de manière à se retrouver sur le dos à mi-chemin, moment où la femelle éjecte alors des œufs qui glissent sur le ventre du mâle. En bouclant leur volte, ils retrouvent leur position initiale et le mâle en profite pour féconder les œufs qui se déposent sur le dos de la femelle. Ils renouvellent l’opération plusieurs fois, le temps pour la femelle de pondre jusqu’à une centaine d’œufs.

Les œufs vont alors se fixer en s’enfonçant dans la peau du dos de la femelle qui dans le même temps s’épaissit et se rigidifie jusqu’à former des alvéoles où les œufs puis les petits vont se développer à l'abri dans l'épiderme de leur génitrice. Au bout d’une bonne dizaine de semaines en émergent des mini-pipas qui ont déjà tout d’un adulte car il n’y a pas de stade larvaire chez ce drôle d’amphibien.

Crédit article : © Julien PIERRE
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